Il serait sans doute exagéré d'affirmer que les héros musclés made in USA des années 80 négocièrent un net virage dans leur filmographie à la fin de la dite décennie. Constatons toutefois que du trio Schwarzenegger / Stallone / Norris, chacune de ses stars du cinéma d'action tourna dans au moins un long métrage où leur image de tough guy s'édulcora, momentanément, à l'heure du reaganisme vieillissant. Des trois défenseurs du monde libre, le géant autrichien fut sans conteste celui qui s'en tira le mieux en 1988 avec la comédie d'Ivan Reitman, Jumeaux, un succès qui le conforta, pour le pire, à rempiler à deux reprises dans le genre, quelques années plus tard, avec le même réalisateur. Bien moins conseillé, le glissement de Stallone vers la comédie pourrait quant à lui se résumer à chaque fois par de mauvais choix : du méconnu New York Cowboy [1] avec Dolly Parton en 1984, à L'embrouille est dans le sac (remake d'Oscar avec De Funès), et Arrête, ou ma mère va tirer !, dans la foulée du simili accident industriel nommé Rocky 5 au début des 90's. Pire, boulimique, bipolaire, etc., Sly s'essaya, en parallèle au succès phénoménal de ses deux franchises, à de nombreux genres, devant ou derrière la caméra [2], enquillant par exemple entre 1986 et 1987 un film d'action policier supra-réac', Cobra, suivi de près par un hybride sportivolarmoyant, mélange subtil de sueur et de larmes, nommé Over the Top. Or détail qui n'en est pas vraiment un, ces deux navets pur jus furent produits par la sacrosainte Cannon, celle qui donna ses lettres de noblesse à celui qui nous intéresse : Chuck Norris.
Non content d'avoir donné un essor notable à la carrière internationale de notre karatéka moustachu au mitan des années reaganiennes [3], les cousins Menahem Golan et Yoram Globus furent ensuite les initiateurs d'un léger changement de direction dans sa filmographie. Pas de quoi remettre en cause les élans patriotiques droitiers et son envie de mettre les pieds où bon lui semble, mais plutôt le désir d'élargir le public de leur poulain en montrant une facette moins rigide. Film d'aventure portnawak directement pompé sur la série des Indiana Jones, Le temple d'or offrit au mieux à Norris un contre-emploi récréatif ; à l'inverse le déstabilisant Héros mit à mal son légendaire flegme martial en le transformant en personnage vulnérable. Un crime de lèse-majesté qui sera sanctionné par le retour en grâce de Scott McCoy deux ans plus tard. Mais n'allons pas trop vite...