Hollywood Chainsaw Hookers - Fred Olen Ray (1988)

N'y allons pas par quatre chemins, Hollywood Chainsaw Hookers est sans aucun doute l'un des longs-métrages les plus cultes de la monumentale filmographie bisseuse du producteur/scénariste/réalisateur Fred Olen Ray. Sorti aux États-Unis au printemps 1988, quelques mois avant L'invasion des cocons avec Charles Napier et The Phantom Empire [1] avec Sybil Danning, tous deux issus également de l'imagination débridée de Ray, le long-métrage pourrait de prime abord se présenter, pour les plus érudits, comme le premier volet d'un diptyque comico-horrifique Los Angelesien. Précédant d'une année le dénommé Beverly Hills Vamp avec Eddie Deezen [2], Hollywood Chainsaw Hookers marquait ainsi la première véritable incursion du réalisateur dans le genre parodique [3], synonyme d'une hybridation salutaire des genres, ayant l'avantage certain de sinon faire oublier, du moins d'atténuer les scories du budget famélique de cette apparentée série Z.

Question : qu'attendre d'un film qui nous annonce dans son titre explicitement un programme composé de tronçonneuses et de putes ? En d'autres termes, Fred Olen Ray répond t-il explicitement aux attentes d'un public déviant alléché par cette non moins judicieuse accroche "Elles vont t'envoyer au septième ciel" ?

Le détective privé Jack Chandler (John Henry Richardson) se voit confier la tache de retrouver la jeune Samantha Kelso (Linnea Quigley) disparue dans les rues de Los Angeles. Au cours de son enquête, il fait la rencontre de Mercedes (Michelle Bauer), aussi sexy que dangereuse, qui appartient à une curieuse secte vouée au culte du dieu antique égyptien Anubis, dirigée par un mystérieux gourou, baptisé L'étranger (Gunnar Hansen), les disciples sont des prostituées armées de… tronçonneuses !
 

Réédité en France en 2014, avec Evil Toons, en DVD par les bons soins déviants de Crocofilms, dans le cadre de leur précieuse collection "Les Inédits du Cinéma Bis", Hollywood Chainsaw Hookers s'inscrit donc comme un pur et sain (enfin nous nous comprenons) produit d'exploitation. Sous couvert de parodier le film noir, le nom du personnage principal faisant malicieusement écho au patronyme du créateur du détective privé Philip Marlowe, le long-métrage suit dès lors les traces des précédents films hybrides de la décennie mixant allègrement gore horrifique et humour noir, à l'instar du Retour des morts-vivants  [4de Dan O'Bannon sorti trois ans plutôt.

Fort d'un scénario crânement portnawak (relisez au besoin le synopsis s'il faut encore vous en convaincre) et de dialogues subtilement foutraques coécrits avec l'aide de T.L. Lankford, collaborateur privilégié de Fred Olen Ray au cours des années 80, de Scalps (1983) à Spirits (1990), Hollywood Chainsaw Hookers prend donc tout autant la forme d'un joyeux bordel, qu'il répond à l'affirmative aux interrogations posées en préambule. Avec son casting de playmates, Michelle Bauer [5], miss Penthouse juillet 1981, et la scream queen Linnea Quigley, révélée en 1985 dans le long-métrage précité de Dan O'Bannon en qualité de première morte-vivante punk topless [6], le film offre aux intéressés un panel de jeunes femmes avenantes, aussi à même de révéler leurs charmes qu'à démembrer leurs victimes masculines à la tronçonneuse. Justifiant son statut culte parmi les œuvres de son réalisateur, Hollywood Chainsaw Hookers possède ainsi quelques séquences mémorables, du premier sacrifice perpétré par Mercedes au son du King Elvis, à la danse des doubles tronçonneuses de Samantha, ou encore la confrontation finale mécanique entre Mercedes et Samantha. 

 

Entouré comme à son habitude d'un cercle rapproché de fidèles et de figures récurrentes du cinéma 80's de Fred Olen Ray, devant et derrière la caméra (les acteurs John Henry Richardson, Jimmy Williams, Michael Sonye et la starlette Dawn Wildsmith, la costumière Jill Conners ou le chef opérateur Scott Andrew Ressler [7]), le réalisateur livre avec Hollywood Chainsaw Hookers, on l'aura compris, une bisserie décomplexée [8], assumant pleinement la nature fauchée et bancale d'une telle entreprise, le film promettant, dans la grande tradition Fredolenrayienne, à la fin de son générique, la sortie d'une fausse séquelle intitulée Student Chainsaw Nurses

Seul bémol, en sus de la présence certes sympathique et référentielle, mais somme toute réduite et monolithique, de Gunnar 'Leatherface' Hansen [9], l'amateur déviant aurait sans aucun doute apprécié davantage de gore, ce dernier se limitant à quelques décilitres de faux sang.  Mais qu'importe les morceaux de bidoche, pourvu qu'on est l'ivresse de l'hémoglobine ! Soit.


D'une bande originale composée par Michael Perilstein (The Deadly Spawn), Hollywood Chainsaw Hookers se distingue enfin par son ambiance psychobilly avec de nombreuses chansons composées par les méconnus The Fugitive Kind et Jesse Hawkins.

Un classique du genre à (re)découvrir.

En bonus : Quelques gifs du film sur notre tumblr.




Hollywood Chainsaw Hookers | 1988 | 75 min | 1.85 : 1 | Couleurs
Réalisation : Fred Olen Ray
Scénario : Fred Olen Ray, T.L. Lankford sous les pseudonymes Dr. S. Carver, B.J. Nestles
Avec : Gunnar Hansen, Linnea Quigley, Michelle Bauer, John Henry Richardson, Dawn Wildsmith, Esther Elise, Tricia Burns
Musique : Michael Perilstein
Directeur de la photographie : Scott Andrew Ressler
Montage : William Shaffer
_________________________________________________________________________________________________

[1] En sus de sa production A l'épreuve des balles réalisé par Steve Carver (Oeil pour oeil), Ray tourna en 1988 le post-nuke Warlords, seconde collaboration avec David Carradine après Armés pour répondre (1986).

[2] Eddie Deezen ou l'incarnation du nerd dans les années 80's, de ses débuts croisés dans la grosse production Grease et le fauché science-fictionel Laserblast, à ses diverses apparitions pour le petit écran (Magnum, L'homme qui tombe à pic, etc.).

[3] Du moins bien plus convaincante que dans Prison Ship (1986).

[4] Film réédité, il y a peu, en blu-ray par les bons soins du Chat qui fume.

[5] Si la dame se fit connaitre au début des années 80 sous le pseudonyme Pia Snow dans plusieurs films pornographiques, dont le classique Café Flesh (1982), en sus de ses nombreux rôles pour Ray (The Tomb, Evil Toons, Warlords), Michelle Bauer tourna à la fin du millénaire pour Jess Franco dans Lust for Frankenstein (1998).

[6] Concept qui sera repris avec plus ou moins de bonheur par le pornocrate français Pierre B. Reinhard dans son film d'horreur La Revanche des mortes-vivantes en 1987.

[7] Premier assistant opérateur dans Biohazard ou Prison Ship de Ray, Ressler quitta l'univers du bis au début des années 90 en devenant assistant opérateur ou cadreur pour David Lynch (de Lost Highway à la troisième saison de Twin Peaks).

[8] On appréciera également en guise d'avertissement le texte introductif : "Les tronçonneuses utilisées dans ce film sont réelles et dangereuses. Elles sont manipulées par des professionnelles. L'équipe du film vous recommande fortement de ne pas reproduire ces scènes à la maison. S urtout si vous êtes nu et sur le point d'engager une partie de jambes en l'air. Ma conscience est claire, (signé) Fred Olen Ray".

[9] Paradoxalement, Hansen est sans aucun doute plus expressif (en tout cas plus concerné) avec un masque qu'à découvert !

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire