Continuons notre périlleux voyage vers cette contrée peuplée de films d'horreur oubliés (et fauchés) avec, cette fois-ci, cette Plage sanglante signée par le dénommé Jeffrey Bloom. Sortie en DVD en 2012 aux États-Unis [1], Blood beach dans sa version originale marche, on l'aura vite deviné, dans le sillage du succès des Dents de la mer de Steven Spielberg au mitan des années 70, et sa cohorte de contrefaçons plus ou moins improbables dont les abracadabrantesques productions italiennes de l'ami Ovidio Assonitis (Tentacules, Piranha 2 - Les tueurs volants). Enfin, de cette catégorie de films dont l'affiche promet davantage que son contenu, La plage sanglante aura néanmoins, à défaut de passer à la postérité, su trouver malgré elle une certaine immortalité en apparaissant (certes subrepticement) dans le Blow Out de Brian de Palma [2]. Mais n'allons pas trop vite.
Californie, Santa Monica. Lors de sa baignade matinale, Harry Caulder (David Huffman) est témoin de la disparition de son amie Ruth Hutton (Harriet Medin), littéralement happée par le sable de la plage, sous les yeux impuissants de son compagnon à quatre pattes. Or, chargés de l'enquête, le lieutenant Piantadosi (Otis Young) et le sergent Royko (Burt Young) n'ont pas le moindre début de piste en absence de cadavre. Tandis que les cas d'agression, de mutilation et de disparition s'accumulent, les médias baptisant le lieu désormais de "plage sanglante", Harry et la fille de Ruth, Catherine (Marianna Hill), décident de découvrir l'origine de ce mystère face à l'impuissance de la police.
Troisième long métrage du scénariste Jeffrey Bloom, qui fit par la suite carrière à la télévision en mettant en scène plusieurs téléfilms et en signant quelques épisodes de séries à succès dont Starsky et Hutch et Columbo, La plage sanglante confirme, ou annonce, le prochain virage professionnel de son auteur. Ainsi, à l'exception de son casting, et en particulier la présence de Burt Young (alias Paulie dans la franchise Rocky) et de John Saxon (figure virile incontournable du cinéma d'exploitation US des années 70-80) dans le rôle du capitaine Pearson, avouons sans peine, et dès à présent, que ce morne spectacle à faire frémir les ménagères et effrayer les jeunes enfants avait plus sa place sur le petit écran, tant le film accumule les défauts récurrents des productions télévisuelles de l'époque.
Du fait des moyens restreints mis à sa disposition, Bloom joue donc la carte, non sans raison, du suspense, laissant échapper néanmoins deux scènes gore plutôt sympathiques, quoique paradoxalement inappropriés, soit la découverte d'un chien en peluche décapité, et l'émasculation d'un violeur sur le point de passer à l'acte. Dommage que de suspense, à l'instar de la présence visible de la créature, il n'y en ait point (il faudra finalement attendre les dernières minutes pour apercevoir une sorte de
plante carnivore croisée avec une antenne parabolique en guise de menace
souterraine [3]). Non content d'être techniquement des plus bâclés (photographie sabotée, musique pompée sur celle de John Williams), le film traine en longueur.
L'idée de départ pouvait sembler originale, et aurait pu donner lieu à une louable série B dans les mains d'un bon artisan ou d'un petit malin à l'instar d'un Joe Dante (qui réalisera justement pour Roger Corman le Jaws look-a-like Piranha), mais La plage sanglante enfonce inexorablement le spectateur vers une terne apathie, que seule l'hystérie de la scream queen du pauvre incarnée par Marianna Hill pourra un temps réveiller [4]. Aux autres d'apprécier la parodie offerte par Burt Young en flic nostalgique de ses années passées à Chicago, plus doué à engloutir des quantités astronomiques de malbouffe qu'à mener une enquête policière. Quant à la présence du Dr. Dimtrios en guise de caution scientifico-pouet pouet, celle-ci enterre encore un peu plus le film dans le grotesque.
Porté par un duo d'acteurs [5] tout droit échappés d'un téléfilm (on l'aura compris), cet hybride ratée entre Les dents de la mer et La révolte des triffides fit l'objet d'une sortie limitée, ses distributeurs n'ayant aucune illusion (on les comprend) quant aux gains que pouvaient récolter son exploitation, contrairement aux producteurs et aux auteurs qui comme le porte à croire la fin du film, étaient fin prêt à lancer une suite. A noter que l'idée de la plage anthropophage fut reprise trois décennies plus tard dans le non moins navrant The Sand (2015) d'Isaac Gabaeff.
En bonus : Quelques gifs du film sur notre tumblr.
Blood Beach (la plage sanglante) | 1980 | 86 min
Réalisation : Jeffrey Bloom
Scénario : Jeffrey Bloom d'après une histoire de Jeffrey Bloom et Steven Nalevansky
Avec : David Huffman, Marianna Hill, Burt Young, Otis Young, John Saxon
Musique : Gil Melle
Directeur de la photographie : Steven Poster
Montage : Gary Griffin
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[1] Et finalement édité en France par Crocofilms en décembre 2016.
[2] L'affiche apparait au mur d'un des couloirs de la société de production qui emploie John Travolta dans le rôle d'un ingénieur de son. CQFD.
[3] Une absence qui soulignerait l'incapacité de Bloom à trouver un monstre relativement convaincant, ce dernier se résolvant à montrer à la dernière minute et très rapidement la croquignolesque bestiole. Impression confortée à la découverte des quelques plans uncut qui soulignent ce flou artistique et une créature qui ne ressemble pas à la version finale.
[4] Ceux qui attendaient la présence de quelques demoiselles fraichement dévêtues pourront également ronger leur frein. D'autant plus dommage que la compagne de Harry, hôtesse de l'air de nationalité française, offrait toutes les qualités requises... comme l'atteste les quelques bribes d'images issues de la version uncut (quand celle-ci se fait boulotter par la créature).
[5] Les deux seules titres de gloire de Marianna Hill sont d'avoir interprété des garces : Deanna Corlone, épouse de Fredo, dans Le Parrain, 2ème partie, et Callie Travers, dans L'homme des hautes plaines.
[2] L'affiche apparait au mur d'un des couloirs de la société de production qui emploie John Travolta dans le rôle d'un ingénieur de son. CQFD.
[3] Une absence qui soulignerait l'incapacité de Bloom à trouver un monstre relativement convaincant, ce dernier se résolvant à montrer à la dernière minute et très rapidement la croquignolesque bestiole. Impression confortée à la découverte des quelques plans uncut qui soulignent ce flou artistique et une créature qui ne ressemble pas à la version finale.
[4] Ceux qui attendaient la présence de quelques demoiselles fraichement dévêtues pourront également ronger leur frein. D'autant plus dommage que la compagne de Harry, hôtesse de l'air de nationalité française, offrait toutes les qualités requises... comme l'atteste les quelques bribes d'images issues de la version uncut (quand celle-ci se fait boulotter par la créature).
[5] Les deux seules titres de gloire de Marianna Hill sont d'avoir interprété des garces : Deanna Corlone, épouse de Fredo, dans Le Parrain, 2ème partie, et Callie Travers, dans L'homme des hautes plaines.
Dans le genre portnawak, Blood Beach se place dans le top 10 ! Pour The Sand d'Isaac Gabaeff, certains plans rappellent une nouvelle de Stephen King : The Raft (des jeunes décérébrés sont coincés sur un radeau tandis qu'une sorte de nappe de pétrole essaie de les tuer dès qu'ils mettent les pieds dans l'eau). Nouvelle adaptée pour le fim Creepshow 2 ;)
RépondreSupprimerMerci pour ce complément d'informations fort lumineux ;-)
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