Douzième album d'Ulver, ATGCLVLSSCAP [1], sorti le 22 janvier dernier sur le label britannique House of Mythology, imprime une fois encore la direction prise par la formation norvégienne depuis 1998 et un certain Themes For William Blake – The Marriage Of Heaven And Hell, disque de Pandore qui avait vu cette ancienne formation de black metal (et leur brutal Aatte hymne til ulven i manden qui clôtura magistralement leur trilogie black une année plus tôt) s'émanciper et quitter son style originel pour naviguer désormais dans des eaux plus électroniques et expérimentales. Après leur précédente collaboration avec Sunn O))) ou leur messe avec l'orchestre de Tromsø, Ulver livre ici sans doute son album le plus ambitieux depuis Perdition City (2001). Sombre. Psychédélique. Progressif. Atmosphérique. Minimaliste. Hypnotique. Ambient. Labyrinthique. Les qualificatifs ne manquent pas tant ce disque de 80 minutes, principalement instrumental, multiplie les facettes, confirmant au besoin la place unique qu'à Ulver dans le paysage musical depuis deux décennies.
Fruit d'improvisations et de relectures captées lors d'une tournée européenne d'une douzaine de dates en février 2014, ATGCLVLSSCAP visait dès son origine à intégrer autant les expérimentations et improvisations que l'énergie et la spontanéité du live. Monté dans un premier temps chez Daniel O' Sullivan, membre d'Ulver depuis l'album Wars of the Roses (2011), le bassiste anglais fut en charge de « sculpter » ses heures d'enregistrements, avant que le reste du groupe, le batteur Anders Møller, le chanteur et leader Kristoffer Rygg et le claviériste Tore Ylwizaker (responsable de la mue électro de 1998) ne soit impliqué plus tard en studio à Oslo.
Nouvelle bande originale d'un film qui n'existe que dans l'imaginaire de ses géniteurs, ATGCLVLSSCAP, du fait de sa durée, n'est pas un disque facile ou immédiat. Ambitieux, varié, sans être foncièrement décousu, les improvisations ayant été savamment intégrées à l'ensemble, l'album évoque autant les artistes krautrock et progressifs allemands des années 70 : Neu!, Klaus Schulze ou Amon Düül II, que le minimalisme d'un Coil [2], influence manifeste des norvégiens depuis de nombreuses années.
Intégrant plusieurs éléments issus d'anciens disques, England's Hidden et Moody Stix contiennent par exemple des samples d'England de l'album Wars of the Roses et de Doom Sticks de l'EP A Quick Fix of Melancholy, des réinterprétations à l'image Nowhere/Catastrophe et Ecclesiastes (A Vernal Catnap) qui sont des relectures de chansons provenant de Perdition City, ou encore D-Day Drone réminiscence de l'album Terrestrials co-écrit avec Sunn O))), les membres d'Ulver proposent avec ATGCLVLSSCAP autant une synthèse de leur art [3], qu'ils en ouvrent un nouveau chapitre.
Un voyage immersif.
01. England's Hidden - 02. Glammer Hammer - 03. Moody Stix - 04. Cromagnosis - 05. The Spirits That Lend Strength Are Invisible - 06. Om Hanumate Namah - 07. Desert/Dawn - 08. D-Day Drone - 09. Gold Beach - 10. Nowhere (Sweet Sixteen) - 11. Ecclesiastes (A Vernal Catnap) - 12. Solaris
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[1] Les amateurs de concept (fumeux) seront aux anges : le titre de l'album provient des initiales des signes du Zodiaque.
[2] O' Sullivan ayant mixé le disque en fait dans l'ancienne maison de Ian Johnstone, ex-collaborateur artistique de Coil.
[3] Gommant au passage les aspects les plus inégaux, bancals voire kitschs de leurs expérimentations électro passées.
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