Dans le cadre de l'édition 2016 de Villette Sonique, le saxophoniste étasunien Kamasi Washington venait conclure le festival parisien par un concert des plus attendus à la Cité de la Musique. Annoncé complet quelque temps avant le jour J, la venue du jazzman d'Inglewood, avortée une première fois suite aux attentats du 13 novembre (1), draina comme on pouvait s'en douter une foule nombreuse et hétéroclite, alléchée par la musique de ce disciple et nouvel ambassadeur de la Great Black Music. Révélation jazz de l'année passée, Washington fut l'auteur d'un monumental album solo, The Epic, triple disque sorti chez Brainfeeder Records, le label de Flying Lotus (alias Steven Ellison - neveu d'Alice Coltrane), dont Washington collabora sur son remarqué You're Dead ! en 2014. Fruit d'une monstrueuse session d'un mois avec les membres
du collectif West Coast Get Down, The Epic allait enfin rayer d'un trait toutes ces années de frustration, limité au seul rôle de sideman et collaborateur de luxe (2), pour mieux permettre à l'ancien saxophoniste des Young Jazz Giants de prendre définitivement et durablement son envol.
Accompagné du noyau dur du collectif, à savoir Brandon Coleman aux claviers et piano, Ryan Porter au trombone, Miles Mosley à la contrebasse, Tony Austin et Ronald Bruner (ancien membre des Young Jazz Giants) à la batterie, et Patrice Quinn aux chœurs, Kamasi Washington délivra durant plus d'une heure et demie ce à quoi le public parisien était venu chercher : un bouillon de culture musical convoquant autant les envolées libertaires d'un Pharoah Sanders ou du maître Coltrane, la maîtrise d'un David Murray, qu'un brassage jazz allant du swing à l'afrobeat.
Ouvrant avec Change of the Guard, soit la composition qui introduit The Epic, le concert fit la part belle, non sans raison, au répertoire issu du dit triple album. Aussi solide individuellement que collectivement, chacun des musiciens eut l'occasion de montrer tout l'étendue de leur talent : du solo barré de Miles Mosley précédant la reprise d'Abraham signé par lui-même, au duel de batteries par Austin et Bruner, sans oublier l'entrée en scène du père de Kamasi, Rickey Washington, à la flûte traversière (et saxophone soprano) sur Henrietta Our Hero.
A la fois accessible et empreinte de virtuosité, la musique jouée par ce jeune chef d'orchestre et saxophoniste de 35 ans confirma sur scène les espoirs portés par ce disque manifeste d'un jazz du 21ème siècle : ni traditionnel, ni fusion, ni swing, ni free, mais tout à la fois. Enfin, en guise d'amuse-bouche et avant de quitter définitivement la scène, la formation interpréta The Soulness, extrait du prochain album.
Épique.
Le concert est disponible sur le site internet d'Arte à cette adresse.
Kamasi Washington
Kamasi Washington (Saxophone ténor)
Tony Austin / Ronald Bruner (Batteries)
Brandon Coleman (Claviers, piano)
Miles Mosley (Contrebasse)
Ryan Porter (Trombone)
Patrice Quinn (Chant, chœurs)
Rickey Washington (Flûte traversière, saxophone soprano)
Plus de photos sur notre tumblr.
Setlist :
01. Intro / 02. Change of the Guard / 03. Re Run Home / 04. Henrietta Our Hero / 05. Abraham (reprise de Miles Mosley) / 06. Solos de batteries / 07. The Magnificent 7 / 08. The Rhythm Changes / Rappel : 09. The Soulness
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(1) Kamasi Washington devait jouer au Trabendo le dimanche 15 novembre 2015, concert qui fut comme tant d'autres annulés par mesure de sécurité.
(2) Non content d'avoir participer au fameux To Pimp a Butterfly de Kendrick Lamar, Washington débuta en collaborant avec Snoop Dog et Heavy D, puis les jazzmen Marcus Miller, Stanley Clarke ou George Duke.
(2) Non content d'avoir participer au fameux To Pimp a Butterfly de Kendrick Lamar, Washington débuta en collaborant avec Snoop Dog et Heavy D, puis les jazzmen Marcus Miller, Stanley Clarke ou George Duke.
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