Don't Breathe - Fede Alvarez (2016)

Auréolé de la mention du meilleur film d'horreur étasunien des deux dernières décennies (détrônant ainsi The Witch, ce dernier ayant destitué l'année précédente It Follows, et en attendant donc l'apparition d'un prochain film régicide en 2017 - vous suivez ?), Don't Breathe [1] du réalisateur Fede Alvarez aura créé la sensation au cours de cet été outre-Atlantique, cette production indépendante se payant même le luxe de faire jeu égal en terme de fréquentation avec les blockbusters estivaux lors de sa sortie fin août. Or, en dépit de plusieurs réserves, qui cette fois-ci n'ont rien de rédhibitoires (suivez le regard du préposé vers les deux films précités), avouons dès à présent que cette apparentée relecture inversée du classique Seule dans la nuit de Terence Young n'en demeure pas moins une bonne surprise. Mais n'allons pas trop vite comme le veut l'adage.

Banlieue de Detroit, Rocky (Jane Levy) rêve de rejoindre la Californie avec sa jeune sœur Diddy. Son quotidien se borne à commettre avec son petit-ami Money (Daniel Zovatto) et Alex (Dylan Minnette) divers cambriolages dans les maisons que gèrent la société de gardiennage du père d'Alex, ce dernier subtilisant le double des clefs détenues par son paternel. Un jour, Money apprends de la part de son receleur qu'un vétéran de l'armée vit seul dans un quartier abandonné avec la coquette somme de 300 000 dollars en liquide. Après un premier repérage et la découverte que l'homme est en fait aveugle, les trois délinquants décident de passer à l'acte le soir même...
 

Live report : All Them Witches - La Maroquinerie, Paris, 10 octobre 2016

Chroniqué en janvier dernier, le troisième album des All Them Witches, Dying Surfer Meets His Maker, demeure, près d'un an après sa sortie le 30 octobre 2015, l'un des coups de cœur de l'année passée du RHCS. Auteurs d'un album conciliant feeling blues et groove stoner rock, les quatre musiciens originaires de Nashville étaient de nouveau de passage à Paris après leur précédent concert, le 8 mars dernier, à La mécanique ondulatoire. Dans le cadre de leur nouvelle tournée européenne de 17 dates, du 2 octobre à Bristol au 21 octobre à Anvers, faisant donc suite à leur précédente tournée sur le vieux continent en début d'année (1), ATW fit escale le 10 octobre à La Maroquinerie, pour un concert annoncé une fois encore complet, à l'instar de la majorité des dates de ladite tournée.

Accompagnant les étasuniens au cours de ce périple européen, les israéliens de The Great Machine avaient la charge d'ouvrir la soirée. Formation en provenance de Tel Aviv, le trio a à son actif trois disques, deux EPs, un premier sorti en mai 2013, un second en avril de cette année, et un album éponyme datant de décembre 2014. Adepte d'un stoner débridé, à l'image du look bigarré des frangins Omer et Aviran Haviv, guitariste et bassiste/chanteur, la musique de TGM évoque par moment le Mondo Generator de Nick Oliveri, entre desert rock, poussées punk et riffs plombés. Une bonne mise en bouche.
 

Live report : John Surman - Théâtre du Châtelet, Paris, 8 octobre 2016

Dans le cadre du festival Jazz sur Seine, du 7 au 22 octobre prochain, le saxophoniste britannique John Surman était convié lors d'une carte blanche à jouer au Théâtre du Châtelet. Étaient invités à cette soirée plusieurs musiciens et collaborateurs de longue date dont le contrebassiste Chris Laurence, la chanteuse norvégienne Karin Krog, le quatuor à cordes Trans4mation String Quartet et Jack DeJohnette, ancien batteur de Miles Davis et compagnon de route pendant trente ans du trio du pianiste Keith Jarrett.

Pour les présentations d'usage, indiquons qu'en plus d'être une figure de proue du jazz européen via le label ECM durant près de quatre décennies, John Surman peut se targuer d'être un souffleur atypique, doublé d'un explorateur à la recherche de nouveaux horizons sonores. Pour cela il suffit d'écouter par exemple son utilisation personnelle des boucles de synthétiseurs ou du re-recording (overdubbing en anglais) [1] sur Westering Home (1972) et Road to Saint Ives (1990). Concert scindé en deux parties bien distinctes, chacun de ces volets avait la tâche de mettre en lumière une des nombreuses facettes protéiformes de cet improvisateur, passé maitre dans l'art de la clarinette basse et du saxophone soprano et baryton.


Une femme dans la tourmente (Midareru) - Mikio Naruse (1964)

Inédit en salles en France jusqu'à sa récente exploitation en décembre dernier, quelques mois après la rétrospective consacrée à son réalisateur, Mikio Naruse, à la Maison de la culture du Japon à Paris en avril 2015 [1], Une femme dans la tourmente sort pour la première fois en DVD dans le cadre du coffret L'âge d'or du cinéma japonais (1935-1975) édité par Carlotta qui sort ce 14 octobre.

Plus discret et secret que ses pairs Akira Kurosawa ou Kenji Mizoguchi, Mikio Naruse (1905-1969) est devenu à l'instar de Yasujiro Ozu l'un des témoins privilégiés des bouleversements de la société nippone d'après-guerre. Réalisateur de 89 films entre le début des années 30 et la fin des années 60, Mikio Naruse a pratiqué plusieurs genres différents, avec toujours la même constante au niveau du récit qui se résume toujours par « une quête de bonheur matériel ou sentimental dans laquelle les personnages se lancent au mépris des convenances morales, quête toujours entamée mais jamais aboutie », comme le souligne Eléonore Mahmoudian dans le Dictionnaire en 101 cinéastes japonais inclus dans ledit coffret. Et Une femme dans la tourmente ne déroge pas à ce constat. Au contraire, ce mélodrame, récompensé en 1964 au festival de Locarno par le prix d'interprétation féminine pour Hideko Takamine, actrice préférée de Naruse, narre l'amour impossible et la passion refoulée de deux êtres stoppée par les conventions sociales de l'époque. Mais n'allons pas trop vite.

Au Japon, la récente ouverture d'un supermarché met à mal la santé financière des petits commerçants d'un quartier d'une petite ville de province. Veuve de guerre, Reiko (Hideko Takamine) s'occupe seule depuis dix-huit ans de l'épicerie appartenant à sa belle-famille, quand son beau-frère, d'une dizaine d'années son cadet, Koji (Yûzô Kayama), revient dans le giron familial après avoir quitté son emploi à Tokyo. Alors que sa famille attend de lui la reprise du magasin, celui-ci mène au contraire une vie oisive et dissolue, entre jeux d'argent, alcool et filles [2]. Or la belle-famille de Reiko qui a d'autres projets pour l'épicerie...
 

Le syndrome d'Edgar Poe - N. G. Mount (1995)

Avant-dernier chapitre inattendu d'une filmographie atypique, avant un téléfilm étasunien Brooklyn Cop (1998) et un WIP longtemps reporté, et à jamais inachevé, dénommé Death Camp [1], Le syndrome d'Edgar Poe de N. G. Mount, alias Norbert Moutier, s'échappe quelque peu des précédentes productions de son auteur. Marquant la fin d'une époque d'intense activité, par la série de quatre longs métrages réalisés en moins de cinq ans jusqu'au mitan des années 90, ce syndrome peut, non sans raison, être considéré par les thèmes évoqués comme son film le plus singulier. Produit dans la foulée de Dinosaur from the Deep avec Jean Rollin, le métrage quitte la science-fiction ultra fauché pour verser dans l'hommage Sadien. Rien que ça. Mais n'allons pas trop vite.

En proie à de récurrents cauchemars et souffrant d'une santé mentale fragile, Roderick (Christophe Bier) croit être l'incarnation du grand écrivain Edgar Allan Poe. En pension chez sa tante (Sylvaine Charlet) depuis sa sortie de la clinique psychiatrique, le jeune homme est incapable d'écrire le moindre mot. Or la comtesse compte sur le futur roman de son neveu pour financer les réparations de son manoir, qui tombe inexorablement en ruine. Aidée par le trouble docteur Kemp (Gérard Stum), celle-ci invite le temps d'un séjour le professeur Waldemar (Robert André) accompagné de son épouse Morella (Brigitte Borghese), une dominatrice férue de sadomasochisme qui a pour mission de rallumer la flamme morbide de Roderick. Témoin de ces pratiques qui débouchent sur la torture et le meurtre de victimes ayant eu le tort d'accepter l'hospitalité de la propriétaire des lieux, Roderick retrouve finalement l'inspiration, tandis qu'un étrange individu vêtu de noir semble hanter les couloirs du château...