1975. Non sans talent et opportunisme, Roger Corman devance de quelques mois le Rollerball de Norman Jewison pour sortir Death Race 2000, série B d'anticipation inspirée par le thème du sport futuriste ultraviolent. Avec à l'affiche David Carradine, tout droit sorti de la série à succès Kung Fu, et accompagné d'un dénommé Sylvester Stallone, cette Course à la mort de l'an 2000 avait le précieux avantage de gagner en transgression et en satire, là où Rollerball se perdait en conjecture prétentieuse. Fort de ce succès et de celui d'un blockbuster sorti en 1977 (mais n'allons pas trop vite), le fameux producteur remet le couvert trois ans plus tard. De par son titre, Deathsport, et la présence de sa vedette télévisuelle [1], celui-ci pourrait résolument se présenter comme une séquelle du précédent, or il n'en est rien. De cette classique méthode de margoulin, qui revient à semer la confusion dans l'esprit quelque peu embrumé des amateurs de bisseries, faisons abstraction, et soulignons au contraire la perspicacité du roi de la série B. Ébauche de ce qui constituera au début de la décennie suivante un genre à part entière après la sortie de Mad Max 2 et de New York 1997, repris à la chaîne par bon nombre de sympathiques tâcherons transalpins, Les gladiateurs de l'an 3000 [2] annonce avec quatre ans d'avance le raz-de-marée post-apocalyptique eighties. De quoi nous faire oublier les nombreuses défauts de Deathsport ? Faut voir...
Mis en scène par la paire débutante Arkush [3] et Niciphor, ce dernier étant également coresponsable du scénario, Deathsport s'inscrit rapidement, au-delà de son verni craquelé post-nuke, comme un énième avatar du Star Wars de Lucas. Hybride mal dégrossi, mixant allègrement prétexte sport mécanique, logorrhées mystico-pouet pouet et effets spéciaux tiers-mondistes, ce long métrage est aussi le premier (d'une longue liste) nanar certifié de la non moins dense filmographie de l'aîné de la fratrie Carradine. Si l'homme sut après Kung-Fu mener de front films de divertissement et productions de haut rang [4], force est de constater que son détachement et son je-m'en-foutisme légendaire prirent rapidement le dessus, enquillant sans discontinuer, à quelques exceptions près [5], films alimentaires et autres cachetonnages télévisuels. Professionnel, Carradine incarne ici un guerrier hippie en pagne, avec cape et capuche en fourrure, et sabre en plexiglas en sus, accumulant dès les premières minutes les handicaps sans sourciller. Respect.
Difficile au contraire d'avoir autant de mansuétude pour le scénario signé Nicholas Niciphor et Donald Stewart. Ordonnateur du scénario multi-couche, le duo, non content de calquer sans discernement les grandes lignes de Star Wars (Richard Lynch interprète un ancien guide désormais au service du mal qui a tué la mère de Carradine, des rebelles mystiques aux pouvoirs magiques portant des sabres, les transitions entre deux scènes qui étaient déjà signées Kurosawa), accumule les pistes non développées et confuses, la palme revenant au kidnapping de la fille de Deneer par des mutants troglodytes, aussi dangereux que des figurants dont on aurait dissimulé les yeux par des balles de ping-pong. Quant aux bourrins qui espéraient un métrage centré sur des jeux du cirque motorisés, ils en seront également pour leur frais : les séquences estampillées Deathsport durent approximativement moins de dix minutes, et les dites death machines sont des motos customisées argentées qui ont tendance à exploser facilement au moindre contact.
Seule et maigre compensation : Richard Lynch nous gratifie de sa présence dans son habituel rôle de méchant, en dépit d'un personnage darkvadorien des plus ridicules et d'un duel final avec Carradine méritant amplement d'être érigé au panthéon du portnawak bis (tout en saluant la performance du monteur Larry Bock, grand artisan de cet imbroglio combatif). Plus inattendu, comprendre que l'argument qui justifie ces scènes est atypique, les attributs sexués de la gent féminine incarné par les playmates, Claudia Jennings [6] (qui aura droit à une séance de stroboscope en supplément) puis Valerie Rae Clark, sont dévoilés lors de séances de tortures (?!) : placée chacune nue dans une pièce ornée de barreaux suspendus, Zirpola semble ainsi plus intéressé par les décharges d'électricité dont elles sont les victimes malheureuses, que par leurs déhanchés et autres numéros d'acrobaties topless. Cependant, la morale voyeuriste restera sauve, le vilain périra par là où il avait péché, et le dénommé Kaz Oshay pourra à loisir apprécier, après leur évasion, l'anatomie de madame Deener.
Doté d'une bande sonore particulièrement infecte [7], du synthétiseur toxique au bruitage suramplifié des terribles Death machines, le souvenir laissé par ces Gladiateurs de l'an 3000 pourrait apparaitre mitigé, voire pire. Mais ce serait vite oublier les critères déviants qui définissent notre Nanarotron. Loin d'atteindre les sommets du mauvais film sympathique, ce David Carradine en pagne (bondissant tel un cabri au-dessus des rochers et brandissant un sabre en plexiglas du plus effet) mérite tout de même les encouragements du public, du moins la reconnaissance du RHCS.
Mille années après la grande guerre nucléaire, le monde connu se résume à de vastes étendus sauvages semi-désertiques d'où submergent de grandes cités, derniers vestiges de l'ancienne civilisation disparue. Le sort de l'humanité se divise entre s'entasser dans des cités surpeuplées, telle Helix City dirigée par le dictateur Lord Zirpola (David Mclean), ou bien errer sur cette terre, inhospitalière et contaminée, peuplée de mutants anthropophages. Devenu fou, le maléfique Zirpola demande à son bras droit, et âme damnée, Ankar Moor (Richard Lynch) de capturer les guides mystiques Kaz Oshay (David Carradine) et Deneer (Claudia Jennings) qu'ils considèrent comme une menace. Emprisonnés et torturés dans un premier temps, les deux rebelles sont condamnés à participer au Deathsport : dans une arène, ils devront combattre jusqu'à la mort les redoutables Death machines.
Mis en scène par la paire débutante Arkush [3] et Niciphor, ce dernier étant également coresponsable du scénario, Deathsport s'inscrit rapidement, au-delà de son verni craquelé post-nuke, comme un énième avatar du Star Wars de Lucas. Hybride mal dégrossi, mixant allègrement prétexte sport mécanique, logorrhées mystico-pouet pouet et effets spéciaux tiers-mondistes, ce long métrage est aussi le premier (d'une longue liste) nanar certifié de la non moins dense filmographie de l'aîné de la fratrie Carradine. Si l'homme sut après Kung-Fu mener de front films de divertissement et productions de haut rang [4], force est de constater que son détachement et son je-m'en-foutisme légendaire prirent rapidement le dessus, enquillant sans discontinuer, à quelques exceptions près [5], films alimentaires et autres cachetonnages télévisuels. Professionnel, Carradine incarne ici un guerrier hippie en pagne, avec cape et capuche en fourrure, et sabre en plexiglas en sus, accumulant dès les premières minutes les handicaps sans sourciller. Respect.
Difficile au contraire d'avoir autant de mansuétude pour le scénario signé Nicholas Niciphor et Donald Stewart. Ordonnateur du scénario multi-couche, le duo, non content de calquer sans discernement les grandes lignes de Star Wars (Richard Lynch interprète un ancien guide désormais au service du mal qui a tué la mère de Carradine, des rebelles mystiques aux pouvoirs magiques portant des sabres, les transitions entre deux scènes qui étaient déjà signées Kurosawa), accumule les pistes non développées et confuses, la palme revenant au kidnapping de la fille de Deneer par des mutants troglodytes, aussi dangereux que des figurants dont on aurait dissimulé les yeux par des balles de ping-pong. Quant aux bourrins qui espéraient un métrage centré sur des jeux du cirque motorisés, ils en seront également pour leur frais : les séquences estampillées Deathsport durent approximativement moins de dix minutes, et les dites death machines sont des motos customisées argentées qui ont tendance à exploser facilement au moindre contact.
Des matte paintings à la pointe
Seule et maigre compensation : Richard Lynch nous gratifie de sa présence dans son habituel rôle de méchant, en dépit d'un personnage darkvadorien des plus ridicules et d'un duel final avec Carradine méritant amplement d'être érigé au panthéon du portnawak bis (tout en saluant la performance du monteur Larry Bock, grand artisan de cet imbroglio combatif). Plus inattendu, comprendre que l'argument qui justifie ces scènes est atypique, les attributs sexués de la gent féminine incarné par les playmates, Claudia Jennings [6] (qui aura droit à une séance de stroboscope en supplément) puis Valerie Rae Clark, sont dévoilés lors de séances de tortures (?!) : placée chacune nue dans une pièce ornée de barreaux suspendus, Zirpola semble ainsi plus intéressé par les décharges d'électricité dont elles sont les victimes malheureuses, que par leurs déhanchés et autres numéros d'acrobaties topless. Cependant, la morale voyeuriste restera sauve, le vilain périra par là où il avait péché, et le dénommé Kaz Oshay pourra à loisir apprécier, après leur évasion, l'anatomie de madame Deener.
Doté d'une bande sonore particulièrement infecte [7], du synthétiseur toxique au bruitage suramplifié des terribles Death machines, le souvenir laissé par ces Gladiateurs de l'an 3000 pourrait apparaitre mitigé, voire pire. Mais ce serait vite oublier les critères déviants qui définissent notre Nanarotron. Loin d'atteindre les sommets du mauvais film sympathique, ce David Carradine en pagne (bondissant tel un cabri au-dessus des rochers et brandissant un sabre en plexiglas du plus effet) mérite tout de même les encouragements du public, du moins la reconnaissance du RHCS.
En attendant Épouvante sur New-York ou Kaine le mercenaire.
En bonus : D'autres gifs du film sur notre tumblr.
Un duel au sommet
Verdict du Nanarotron :
Deathsport (Les gladiateurs de l'an 3000) | 1978 | 82 min
Réalisation : Allan Arkush, Nicholas Niciphor
Production : Roger Corman
Scénario : Nicholas Niciphor, Donald Stewart d'après une histoire de Frances Doel
Avec : David Carradine, Claudia Jennings, Richard Lynch, William Smithers, Will Walker, David McLean, Jesse Vint, H.B. Haggerty
Musique : Andy Stein
Directeur de la photographie : Gary Graver
Montage : Larry Bock
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[1] Mais sans Sylvester Stallone désormais indisponible. Étonnant, non ? A la lecture de ce qui va suivre, pas tant que ça...
[2] Titre français prémonitoire avant 2072, les mercenaires du futur de Lucio Fulci, 2020 Texas Gladiators du crapoteux Joe D'Amato ou encore le supra-portnawak Les prédateurs du futur de Ruggero Deodato.
[3] Avant d'entamer une carrière de producteur et réalisateur à succès pour la télévision (Heroes, Preuve à l'appui), Allan Arkush cosigna pour l'écurie Corman, avec un autre débutant nommé Joe Dante, Hollywood Boulevard (1976) et Rock 'n' Roll High School (1979).
[4] Un biopic sur le chanteur folk Woody Guthrie, En route pour la gloire (1976), ou encore l'année suivante L'œuf du serpent (Bound For Glory) d'Ingmar Bergman. Tout de même.
[5] A l'instar de Long Riders (1980) de Walter Hill où il retrouve ses frères Keith et Robert. Une indifférence pour la chose filmique à néanmoins pondérer dans les années 70 et début 80, Carradine tournant en effet dans nombres de films alimentaires pour financer la post-production de son film Americana, qui fut présenté à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes en 1981, avant de sortir deux ans plus tard sur les écrans.
[6] Claudia Jennings dont le dernier rôle au cinéma est Fast Compagny de David Cronenberg, cette dernière disparaissant en octobre 1979 dans un (prémonitoire ?) accident de voiture.
[7] A noter que parmi les crédits, la présence d'un certain Jerry Garcia à la guitare est mentionnée. Homonyme ou le leader du Grateful Dead était en mal de liquidité ?
[6] Claudia Jennings dont le dernier rôle au cinéma est Fast Compagny de David Cronenberg, cette dernière disparaissant en octobre 1979 dans un (prémonitoire ?) accident de voiture.
[7] A noter que parmi les crédits, la présence d'un certain Jerry Garcia à la guitare est mentionnée. Homonyme ou le leader du Grateful Dead était en mal de liquidité ?
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